"Epiblog ?
Cette aventure touche à sa fin. Le dernier chapitre. L’épilogue de ce
blog.
Voici l’épiblog. Ou plutôt, un état des lieux de la fin. Pas la fin.
Pas encore. Pour la bonne et simple raison, que la fin, je l’ignore. Elle
m’échappe encore. Seules les glaces de l’Antarctique détiennent la vérité.
Bref rappel des évènements du chapitre précédent, pour ceux qui auraient
perdu le fil de cette histoire:
Après des jours bloqué à une centaine de
kilomètres de DDU, l’Astrolabe est parvenu à rejoindre le bord de la
banquise à 40 kilomètres de la base. Aussitôt, et profitant d’une belle
fenêtre météorologique, les vols hélico ont débuté, déchargeant tour à
tour, personnel, vivres et matériel. Un vent de liberté imminente
soufflait alors sur l’île. L’état des lieux était fait. La 63 passait les
clefs à la 64, officiellement. Nous allions bientôt fouler à nouveau le
pont de l’Astrolabe... Quelques jours de déchargement donc, puis l’annonce
tant attendue est tombée : « tenez-vous prêt à embarquer demain ». Un 21
décembre, soit 14 mois, jours pour jour après avoir quitté la France.
Tout est alors allé très vite, peut-être trop. En effet, c’est en une
seconde que j’ai quitté cette île sur laquelle j’ai passé plus de 400
nuits. Binaire. 1-0. Vous êtes là, vous n’y êtes plus. Brutal mais
nécessaire. Un départ en bateau se fait en douceur, et vous laisse le
temps de regarder ce rocher s’éloigner, doucement, inéluctablement, en
vous disant non sans émotion, qu’il est probable que vous ne le reverrez
jamais. J’imagine alors, que vous partez la gorge nouée, en vous
remémorant les bons moments. L’hélico ne permet pas ça et c’est peut-être
mieux ainsi. Vous êtes comme happés, absorbés par le vol en lui-même. Il
agit comme un dernier cadeau qui vient clôturer cette année peu ordinaire.
Un vol fabuleux où vous survolez ces bergs que vous avez cotoyés toute
l’année. Magique.
Une fois à bord, l’émotion est réellement présente. Vous vous rappelez
l’aller. Vous retournez 14 mois en arrière. Les coursives, la passerelle,
les banettes, tout est là, dans l’état dans lequel vous l’aviez laissé.
Vous repensez alors à votre état d’esprit de l’époque : l’excitation,
l’appréhension face à l’inconnu. Les questions. Les doutes. Vous vous
dîtes que le temps a passé. Et vite finalement. C’était hier. Passé ce
stade, une seule question vous taraude : allons-nous passer le pack sans
encombre? Cette bande de glace compacte, dérivante, qui agit comme une
barrière mouvante. Moins de 48h plus tard, nous avions notre réponse.
L’océan. Libre. La route était dégagée. Nous sommes passés comme dans du
beurre demi-sel. Hobart était désormais à 5 jours devant nous. Nous étions
en eau libre. Plus rien, dans nos esprits comblés et un brin crédules, ne
pouvait nous empêcher d’être là pour le nouvel an...
Mais voilà, l’Antarctique reste l’Antarctique. Je disais plus haut qu’il
est probable que je ne reverrai jamais ce coin du monde. Pourtant, chacun
sait qu’il serait imprudent de dire « jamais ». Allez savoir, si dans mes
vieux jours, le compte en banque bien garni, l’envie me venait
d’entreprendre une croisière pour riches touristes en mal d’aventure et
d’exotisme glacé, sur un navire russe aux abords de Dumont D’Urville!
Insensé ? Pas si sûr. Quoi qu’il en soit, après avoir passé un Noël peu
commun dans une mer houleuse à souhait, et alors que nous étions à 3 jours
d’Hobart, quelle drôle d’émotion de voir le cap du bateau virer de 180°.
Vous croyez alors à une mauvaise blague. L’Antarctique agirait-il comme un
aimant ?
Nous voici donc, vendredi 27 décembre plus au sud encore que Dumont
D’Urville, tentant de pénétrer dans un pack dont la densité n’a d’égale
que la blancheur. L’aventure ne ferait-elle que commencer ? Allez
savoir... "
lundi 30 décembre 2013
dimanche 22 décembre 2013
Info pratique
Info pratique
D’ici quelques jours, je n’aurai plus
accès à mon adresse mail de DDU. Pour ceux et celles qui tenteraient de me
joindre et qui n’auraient pas de nouvelles de ma part, voici mon mail, celui de
la « vraie » vie : thibautnebout@gmail.com
mercredi 11 décembre 2013
Où comment prendre ses malles en patience
Où comment
prendre ses malles en patience
Manchot futé l’avait pourtant prédit : la
route qui mène à Dumont D’Urville sera peu praticable en cette période de fête
de fin d’année. Alerte blanche! L’Astrolabe
se retrouve en effet bloqué dans des embouteillages de glace. Même s’il n’est
plus très loin, à peine 100 kilomètres, il l’est suffisamment pour que l’hélicoptère
ne puisse décoller et entamer le déchargement en vivres, matériels et
personnels. Les consignes de sécurité sont très strictes en la matière suite
aux accidents survenus par le passé. Quand bien même il serait à portée de
rotor, la météo vient jouer les troubles fêtes (de fin d’année). Alors que le
beau temps commençait sérieusement à faire transpirer la faune locale les
semaines passées, une tempête s’est levée comme pour maintenir la réputation
sulfureuse du climat austral, et célébrer le retour en ses eaux du navire
polaire français.
La TA63 prend donc son mal en patience. Les malles
sont bouclées, pesées, étiquetées. Les couloirs du dortoir ressemblent à un
tétris géant. Chacun est fin prêt. Chacun suit quotidiennement les progrès de l’Astrolabe sur google earth. Les
pronostic vont bon train (étonnant pour un bateau) quant à une date de retour possible
sur Hobart. Il y a les utopistes, qui nous voient en France pour Noël, les optimistes
qui envisagent un nouvel an possible en France, les réalistes qui ont
conscience des aléas possibles et qui s’abstiennent de tous pronostics et enfin
les résignés qui ne s’expriment plus, qui végètent, tournent en rond tels des derviches tourneurs. Et puis, parmi tout ça, parmi cette
agitation générale, parmi cette excitation entremêlée de fatigue et de
nervosité, il y a les quelques nouveaux de la 64, qui doivent se demander où
ils ont mis les pieds et pourquoi nous sommes tant pressés de rentrer chez nous.
Tout comme moi, il y a un an. Ils comprendront dans un an, quand leur tour
viendra.
vendredi 29 novembre 2013
dimanche 17 novembre 2013
La roue tourne
La roue
tourne
Il y a un an, je découvrais tout juste mon
nouvel environnement, impressionné, émerveillé, intimidé presque. Mes VTN (vêtements
polaires) fraîchement déballées du paquetage IPEV, étaient alors respectivement
rouge tomate et bleu schtroumpf, elles possédaient cette odeur de neuf, bien
trop froide aux narines. Mes Sorel
étincelaient de propreté. Mon pas sur la banquise était hésitant, fébrile, et j’immortalisais
sur ma carte SD, chaque manchot que je croisais, chaque berg dépassé.
Un an plus tard, ces mêmes habits ont subi les
assauts du temps : mes VTN ont connu le sel, le vent, le soleil, les
déjections de manchots, les écailles de poissons et les
« soulagements » de phoques de Weddell. Si bien que le rouge tomate
et le bleu schtroumpf ont grandement perdu de leur superbe. Mes sorel ont foulé
la neige, la banquise, l’eau de mer parfois, le guano : le cuir s’est
déchiré, les lacets sont en lambeaux. Ces vêtements portent désormais une
histoire, la mienne. Ils ne sont plus ces simples pièces de tissus anonymes
fabriquées en série, ils se sont enrichis d’un vécu. Mon pas est devenu plus
sûr. Je sais depuis, déjouer certains pièges de la banquise. Je prends le temps
d’observer les manchots, les phoques, les pétrels, plutôt que de chercher à les
mettre en boîte. J’admire les bergs. ( Et j’attends toujours la mer ! )
La roue a tourné donc. L’arrivée des premiers
hivernants de la 64ème mission en Terre Adélie est venue nous le
rappeler. Les néophytes que nous étions font désormais figure d’anciens, de
vieux routiers de la banquise. C’est à nous à présent de transmettre notre
expérience du terrain, notre « savoir » si modeste soit-il. La passation est en marche.
lundi 28 octobre 2013
Vol au dessus d’un nid de coucou
Vol au
dessus d’un nid de coucou
Le 26 février dernier, l’Astrolabe larguait les amarres et filait plein nord, laissant
derrière lui 25 naufragés volontaires. Ce samedi 26 octobre, en fin d’après
midi, un avion de la toute nouvelle compagnie low cost Air Adélie s’est posé avec succès (et c’est tant mieux me
direz-vous) sur une piste aménagée pour l’occasion par le personnel au sol non
qualifié, à savoir, nous. Cet heureux évènement vient clôturer 8 mois d’isolement.
Un avion donc et non un bateau cette année. En effet, l’étendue de la
banquise est telle, qu’il a été décidé dans les hautes sphères de la logistique
IPEVienne de ne pas tenter le diable en prenant la désormais traditionnelle
voie maritime Hobart - DDU. Depuis quelques années maintenant, la première
rotation est pour le moins hasardeuse en raison d’un pack qui semble s’être
littéralement amouraché de l’Astrolabe.
C’est donc par les airs et non par la mer que notre hivernage s’est envolé. Et
quelle émotion de voir surgir de nul part cet aéronef déchirant le ciel vierge
de « notre » Terre Adélie. Car cet avion, un C130 pour les amateurs
de machine volante, est bien plus qu’un vulgaire zing. (Il débloque le gars du
bout du monde, me direz-vous !) Il est le signe du début de la fin. Le symbole
du renouveau aussi. De nouvelles têtes. Certes peu. Seulement 6 personnes sont
venus gonfler les rangs, mais déjà, le repas est plus bruyant, le service base,
plus long... Ce samedi soir,il y avait une réelle effervescence à Dumont
D’Urville. D’autres avions suivront. Malheureusement, celui-ci n’étant pas
pourvu des cales de l’Astrolabe, il ne
symbolise en rien les tomates juteuses, les concombres frais, les carottes « goûtues »,
et les précieux colis des proches...
Et comme pour nous confirmer
que la fin est proche, les premiers manchots adélie regagnent l’île et
reprennent, indifférents à toute cette agitation, leur sempiternelle chasse aux
cailloux.
lundi 14 octobre 2013
Avis de naissance
Avis de
naissance
12 octobre 2013 : Premier
veau de phoque de Weddell observé au sein de l’archipel.
samedi 12 octobre 2013
En mal de mer
En mal de mer
Quel étrange paradoxe,
je le concède, lorsque l’on vit sur une île de ressentir le manque de la grande
bleue. Car elle est bien là, tout autour de nous. Elle est bien là mais sous
nos pieds, dissimulée, en hibernation, écrasée par le poids d’une carapace de
glace devenue trop lourde. Inaccessible. Où sont ces embruns qui viennent vous
fouetter le visage ? Le bruit si doux à l’oreille du clapotis des vagues,
du ressac ? L’odeur d’iode ? Et ce bleu si profond ? Elle est comme
contenue, enfermée. Bien sûr, il y a le trou de pêche, cette fenêtre sur la
mer, œuvrant comme le hublot d’un bateau vous permettant de ne voir qu’une
infime partie. Cloisonnée, enserrée. Voilà presque 8 mois que la mer semble
s’être retirée, comme lors d’une trop forte marée de jusant. J’attends la renverse,
impatiemment. Même elle finalement, nous a abandonné à notre hivernage. Alors
je scrute l’horizon, espérant secrètement distinguer à l’horizon une zone
sombre, ce bleu intense témoin de la présence d’une polynie en approche, cette
portion d’eau libre ayant eu raison de la banquise. Car, les images satellites
le confirment, deux polynies rôdent aux abords de Dumont D’Urville. Parfois,
les jeux de lumière, l’ombre d’un nuage projeté sur la banquise me jouent des
tours. Non, toujours rien pour l’instant ! En attendant, j’observe ces
empereurs repartant nonchalamment en direction du Nord, non sans une certaine envie.
vendredi 20 septembre 2013
dimanche 15 septembre 2013
Activités sportives extérieures
Activités
sportives extérieures
Il est certaine chose dont on peut affirmer avec
certitude : « je ne le ferai qu’une fois dans ma
vie ! ». Rouler à vélo
sur l’océan le plus tempétueux de la planète, faire du ski sur une île en
Antarctique sont de celles-là ...
vendredi 13 septembre 2013
Made in DDU
Made in DDU
Isolez-vous,
installez-vous à l’écart sur un rocher ou sur la banquise, tendez l’oreille et
écoutez : rien. En Antarctique, en plein hiver, tout semble figé, immobile.
Le temps paraît comme suspendu. Il semble avoir perdu de son emprise sur toute
chose. Et soudain un bruit, un « crac » vient chasser cette douce
illusion et vous sortir de cette trompeuse torpeur : est-ce le bruit de la
banquise qui travaille ? Le glacier prêt à se délester d’un berg ? A
moins que ce ne soit une allumette venant incendier cette bougie trônant fièrement
au sommet de cette douceur faite de sucre et de crème, vous rappelant cruellement
que, ici comme ailleurs, le temps poursuit son incessant travail de sape. Vous
venez de vieillir d’une année !
Nous sommes 25
hivernants : c’est donc 25 anniversaires, idéalement répartis sur les
douze mois de l’année par je ne sais quel heureux hasard, que nous avons à
célébrer. Pas un mois ne passe en Terre Adélie, donc, sans qu’un gâteau ne vienne
un samedi soir clôturer un repas. Et bien sûr, qui dit anniversaire, dit
cadeaux ! Or, comme chacun le sait, ici point de lèche-vitrine
envisageable le samedi après-midi, aucune échoppe sur la place centrale de l’île,
aucune vitrine alléchante pour le chaland qui passe, aucun magasin dans lequel
trouver le cadeau de dernière minute et qui ferait l’affaire, bon an mal an.
Non, ici, tout est réfléchi et confectionné sur place avec les moyens du bord. Système
D-DU. Chaque cadeau est ainsi estampillé « made in DDU ». Bien sûr, certains ont un avantage certain
de part leur métier et leur savoir-faire : aussi, un menuisier par
exemple, a sur le papier (mais en pratique aussi, je vous le confirme (cf.
Photo)) davantage d’aptitude qu’un biologiste marin, à concevoir de belles
choses, et il y a vraiment de très belles choses de réalisées
ici.
Pas moins de 6
DDUistes, dont je fais partie, ont pris une année supplémentaire au cours du
mois d’août. Un mois placé sous le signe de la pâtisserie et de l’artisanat
local donc ! DDU s’est alors mue en sorte d’atelier clandestin, où chacun
s’est affairé à la réalisation de ses présents. Une sorte d’émulation s’est
emparée de la base. De quoi s’occuper lors des nombreuses journées de tempête. Ici,
nous vivons une vie dépourvue de stress (pour ma part du moins), et s’il est
une chose qui peut vous causer quelques insomnies, c’est bien l’échéance du
prochain anniversaire arrivant à grand pas, et pour lequel vous n’avez toujours
pas d’idée de cadeaux. Certains ont trouvé la parade, en ayant un fil
conducteur tout au long de l’année, ce qui vous évite la sempiternelle
question : « qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui
offrir ? ». Si c’est véritablement le néant absolu, il vous reste la
possibilité de vous associer et de vendre ainsi vos services : contribuer
à la confection de telle ou telle pièce peut constituer un recours salutaire. Si
vraiment rien ne vient, vous n’avez plus qu’à rester retranché dans votre
« cellule » et attendre que le temps passe. Mais septembre est déjà
là, avec son cortège d’anniversaires !
lundi 12 août 2013
Ca tourne en Antarctique !
Ca tourne en Antarctique !
Vous l’ignorez sans
doute, l’information n’ayant pas été relayée par les médias du monde entier,
mais sachez qu’à l’instar de Cannes, l’Antarctique possède son festival du
septième art. Certes, quelques différences subsistent tout de même : ici,
point de montée des marches pour cause évidente d’absence de public et de
paparazzi, point de Carlton pour héberger star montante ou simple « m’as
tu vu », le tapis n’est pas rouge mais bien blanc (si tant est qu’il
y en est un) et « plaisir, humour, auto-dérision et modestie » pourrait
être la devise de ce festival. D’ailleurs à toi, qui t’apprêtes à visionner nos
chefs d’oeuvre (et je suis modeste), je sollicite toute
ton indulgence !
Le principe est
simple. Deux catégories de films sont proposées par chacune des bases
présentent en Antarctique qui souhaitent participer (aucune obligation, la
démarche est volontaire) : une catégorie libre et une catégorie 48h.
· La catégorie
"Libre" :
* Sujet complètement ouvert : drame,
comédie, documentaire, musique, art, etc.
* Doit être filmé en Antarctique
* La durée ne doit pas excéder 5
minutes
* Les films devront tous être mis à
disposition sur le partage Google
Drive pour le lundi 5 août.
· La catégorie "48
heures" :
* Organisée pendant le premier week-end
d'août, les 3 et 4
* 5 éléments, choisis par les
vainqueurs de l'an dernier, devaient être inclus dans le film.
Il s'agissait :
o d'un son :
un éternuement
o d'un petit
objet (plus petit qu'un sac à dos) : une
balle de ping pong
o d'un gros
objet (plus gros qu'un sac à dos) : une
baignoire
o d'une phrase
de dialogue : Voulez-vous coucher
avec moi ce soir ?
o d'un
personnage : Mister Gingerbread
(cf. Shrek)
Ensuite, tous les
films sont partagés entre les bases et chaque personne vote pour son film
préféré. L’issue de ces votes sera connu dans les jours qui viennent.
Nous avons proposé
deux films correspondant à chacune de ces catégories. Toute la base s’est
investie et ce fut un vrai moment de détente et de franche rigolade en cette
période post mid.
Bon visionnage
Open
Libre
lundi 29 juillet 2013
Cinéberg
Cinéberg
Je crois que tout est dans le titre ! Pour
ceux qui ne comprendraient pas, voici une image.
samedi 27 juillet 2013
Juillet
Juillet
Alors que l’été bat son plein en France, en
Belgique et ailleurs, ici c ‘est bel et bien toujours l’hiver, pas de
doute possible, le thermomètre est là pour nous le rappeler.
Depuis le 21 juin, nous sommes entrés dans la
seconde moitié de l’hivernage : les éphémérides annoncent que les jours
rallongent, alors je m’efforce de les croire, même si vu de ma fenêtre, il y a
encore beaucoup trop d’obscurité à mon goût! L’arrivée de juillet coïncide
avec celle des premiers poussins d’empereurs : de nouveaux cris se font
entendre à la manchotière et en observant attentivement, on peut apercevoir
de petites boules grises blotties sur les pattes de leur parent. Les mâles,
dont la femelle est de retour, peuvent alors entreprendre le long chemin vers
la mer pour se refaire la cerise. On assiste alors à un réel chassé-croisé
entre les femelles revenant à la colonie et les mâles regagnant l’eau libre, chassé
croisé qui n’est pas sans rappeler celui des juillettistes et aoûtiens en cette période de vacances
estivales. Les mâles (de manchots et non des estivants !), amaigris par
près de 4 mois de jeûne doivent au préalable, entreprendre une périlleuse
passation du poussin aux femelles, grasses et dodues. Par -30°c, un poussin
exposé au contact de la banquise et du vent ne résiste pas longtemps. Mais je
ne m’étendrai pas sur la vie trépidante et quelque peu
exceptionnelle des manchots empereurs, ces oiseaux remarquables ayant déjà eu
la faveur des médias et du grand public par le passé. C’est vrai ça et quid des
poissons ? A quand « la nage du poisson des glaces », ou bien
encore « la nécrophagie des amphipodes indigestes » ?
Juillet est aussi (et surtout) marqué par un
événement fort heureusement peu fréquent, et qui nous rappelle combien nous
sommes seuls, isolés et un peu vulnérables, il faut bien le dire. Une piqûre de
rappel en quelque sorte, qui nous extirpe de notre quotidien douillet et nous permet
de nous resituer un peu. En cette période hivernale, où la durée du jour ne
permet plus de s’évader bien longtemps hors base, il est très rapide de
considérer le séjour et le dortoir comme le centre de notre univers : un
univers douillet et confortable, nous faisant oublier que nous sommes en Antarctique.
En début de mois donc, la station de pompage d’eau de mer a brusquement cessé
de fonctionner. Il faut bien saisir que sans cette station, point d’eau de mer
donc point d’eau douce, point de chauffage et à terme, point final ! En bon
néophyte que je suis en la matière, il m’a suffit d’observer l’activité
« fourmiliesque » et la mine déconfite et anxieuse des personnes
susceptibles de remédier au problème pour comprendre que la situation était un
peu critique. Deux jours durant, tout a été entrepris, tenté. Immédiatement,
nous sommes passés en phase de restriction d’usage d’eau douce : point de
douche, point de wc. L’eau douce, un bien devenu précieux ! Sans trop
saisir ni comment, ni pourquoi, après 2 jours d’insomnie pour certains, la
pompe d’eau de mer a pu être réamorcée, pour le soulagement de tous. Cet
événement a bien sûr occasionné des problèmes en cascade par la suite, mais
nous avons évité le pire, et les buveurs de Ricard ont retrouvé le
sourire : l’eau vient à nouveau troubler le liquide dorée à l’heure
de l’apéro!
vendredi 5 juillet 2013
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