Juillet
Alors que l’été bat son plein en France, en
Belgique et ailleurs, ici c ‘est bel et bien toujours l’hiver, pas de
doute possible, le thermomètre est là pour nous le rappeler.
Depuis le 21 juin, nous sommes entrés dans la
seconde moitié de l’hivernage : les éphémérides annoncent que les jours
rallongent, alors je m’efforce de les croire, même si vu de ma fenêtre, il y a
encore beaucoup trop d’obscurité à mon goût! L’arrivée de juillet coïncide
avec celle des premiers poussins d’empereurs : de nouveaux cris se font
entendre à la manchotière et en observant attentivement, on peut apercevoir
de petites boules grises blotties sur les pattes de leur parent. Les mâles,
dont la femelle est de retour, peuvent alors entreprendre le long chemin vers
la mer pour se refaire la cerise. On assiste alors à un réel chassé-croisé
entre les femelles revenant à la colonie et les mâles regagnant l’eau libre, chassé
croisé qui n’est pas sans rappeler celui des juillettistes et aoûtiens en cette période de vacances
estivales. Les mâles (de manchots et non des estivants !), amaigris par
près de 4 mois de jeûne doivent au préalable, entreprendre une périlleuse
passation du poussin aux femelles, grasses et dodues. Par -30°c, un poussin
exposé au contact de la banquise et du vent ne résiste pas longtemps. Mais je
ne m’étendrai pas sur la vie trépidante et quelque peu
exceptionnelle des manchots empereurs, ces oiseaux remarquables ayant déjà eu
la faveur des médias et du grand public par le passé. C’est vrai ça et quid des
poissons ? A quand « la nage du poisson des glaces », ou bien
encore « la nécrophagie des amphipodes indigestes » ?
Juillet est aussi (et surtout) marqué par un
événement fort heureusement peu fréquent, et qui nous rappelle combien nous
sommes seuls, isolés et un peu vulnérables, il faut bien le dire. Une piqûre de
rappel en quelque sorte, qui nous extirpe de notre quotidien douillet et nous permet
de nous resituer un peu. En cette période hivernale, où la durée du jour ne
permet plus de s’évader bien longtemps hors base, il est très rapide de
considérer le séjour et le dortoir comme le centre de notre univers : un
univers douillet et confortable, nous faisant oublier que nous sommes en Antarctique.
En début de mois donc, la station de pompage d’eau de mer a brusquement cessé
de fonctionner. Il faut bien saisir que sans cette station, point d’eau de mer
donc point d’eau douce, point de chauffage et à terme, point final ! En bon
néophyte que je suis en la matière, il m’a suffit d’observer l’activité
« fourmiliesque » et la mine déconfite et anxieuse des personnes
susceptibles de remédier au problème pour comprendre que la situation était un
peu critique. Deux jours durant, tout a été entrepris, tenté. Immédiatement,
nous sommes passés en phase de restriction d’usage d’eau douce : point de
douche, point de wc. L’eau douce, un bien devenu précieux ! Sans trop
saisir ni comment, ni pourquoi, après 2 jours d’insomnie pour certains, la
pompe d’eau de mer a pu être réamorcée, pour le soulagement de tous. Cet
événement a bien sûr occasionné des problèmes en cascade par la suite, mais
nous avons évité le pire, et les buveurs de Ricard ont retrouvé le
sourire : l’eau vient à nouveau troubler le liquide dorée à l’heure
de l’apéro!
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