Vous lisez ces quelques lignes, vous savez donc que
je suis parti en Antarctique pour plus d’une année. En revanche, savez-vous ce
que je suis parti y faire concrètement ? Vous savez peut-être que je suis le
biologiste marin de Dumont D’Urville. Bon, mais une fois qu’on a dit ça, on a tout
et rien dit à la fois. Une brève description de mon travail s’avère donc
nécessaire.
J’ai été recruté pour travailler sur deux
programmes de recherche :
- REVOLTA (acronyme de Radiations EVOLutives en
Terre Adélie). L’idée de ce programme est de réaliser un inventaire de la faune
marine benthique de l’archipel de Pointe Géologie. Benthique ? Mais
qu’est-ce donc ? Ce terme désigne la faune qui vit en étroite relation
avec le fond des mers. Il s’agit par exemple des étoiles de mer, des oursins,
des crabes et certains poissons de fond. A l’inverse, on parle de pélagique pour les organismes vivant
dans la colonne d’eau : les méduses, le plancton, certains poissons, les
mammifères marins...
Un inventaire pour, d’une part, connaître ce qui
vit dans ces mers froides (-1,5°c) et d’autre part, comprendre comment ces
espèces se sont diversifiées, à quel rythme. Différentes techniques de
laboratoire sont ensuite déployées : de la génétique des populations, de
la biologie moléculaire... Certains specimens sont conservés dans de l’alcool
en vue d’alimenter les collections du Museum National d’Histoire Naturelle à
Paris.
Pour mener à bien cet inventaire, je vais être
amené à utiliser toute sorte
d’engins de prélèvements : chalut à perche, filet trémail, nasses, benne,
drague et même la canne à pêche !
Je suis donc le pêcheur de DDU.
Durant l’été, à partir de janvier, je travaillerai
depuis une embarcation, le seatruck. En hiver, la banquise est formée. Il y a
actuellement 1,40m d’épaisseur de glace. Mais alors, comment faire pour pêcher
me direz-vous ! Et bien tout simplement en faisant un trou dans la glace
pour avoir accès à l’eau libre et ainsi continuer à effectuer des prélèvements.
Une fois celui-ci fait, il faut l’entretenir régulièrement afin d’éviter qu’il
ne regèle. On peut également continuer à pêcher depuis les
« rivières » qui se forment lors de l’écartement des plaques de
banquise. Il faut alors être prudent, car l’épaisseur de la banquise aux abords
de l’eau est très faible.
- ICELIPIDS (pas d’acronyme juste de l’anglais). Il
s’agit ici de suivre les variations de concentrations de biomarqueurs lipidiques
(produits par le phytoplancton) en fonction des paramètres
environnementaux : l’épaisseur de la banquise, la température de l’eau...Le
phytoplancton étant la base de la chaîne alimentaire en milieu marin, l’idée
est de suivre le transfert de ces biomarqueurs aux autres organismes
(zooplancton, invertébrés, poissons). Sur le terrain, je réalise des carottages
de glace, des prélèvements d’eau, des traits de filets à plancton. Tout ceci
est ensuite analysé au laboratoire.
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