lundi 19 novembre 2012

Le pêcheur de DDU


Vous lisez ces quelques lignes, vous savez donc que je suis parti en Antarctique pour plus d’une année. En revanche, savez-vous ce que je suis parti y faire concrètement ? Vous savez peut-être que je suis le biologiste marin de Dumont D’Urville. Bon, mais une fois qu’on a dit ça, on a tout et rien dit à la fois. Une brève description de mon travail s’avère donc nécessaire.

J’ai été recruté pour travailler sur deux programmes de recherche :

- REVOLTA (acronyme de Radiations EVOLutives en Terre Adélie). L’idée de ce programme est de réaliser un inventaire de la faune marine benthique de l’archipel de Pointe Géologie. Benthique ? Mais qu’est-ce donc ? Ce terme désigne la faune qui vit en étroite relation avec le fond des mers. Il s’agit par exemple des étoiles de mer, des oursins, des crabes et certains poissons de fond.  A l’inverse, on parle de pélagique pour les organismes vivant dans la colonne d’eau : les méduses, le plancton, certains poissons, les mammifères marins...
Un inventaire pour, d’une part, connaître ce qui vit dans ces mers froides (-1,5°c) et d’autre part, comprendre comment ces espèces se sont diversifiées, à quel rythme. Différentes techniques de laboratoire sont ensuite déployées : de la génétique des populations, de la biologie moléculaire... Certains specimens sont conservés dans de l’alcool en vue d’alimenter les collections du Museum National d’Histoire Naturelle à Paris.
Pour mener à bien cet inventaire, je vais être amené à utiliser  toute sorte d’engins de prélèvements : chalut à perche, filet trémail, nasses, benne, drague et même la canne à pêche !
Je suis donc le pêcheur de DDU.
Durant l’été, à partir de janvier, je travaillerai depuis une embarcation, le seatruck. En hiver, la banquise est formée. Il y a actuellement 1,40m d’épaisseur de glace. Mais alors, comment faire pour pêcher me direz-vous ! Et bien tout simplement en faisant un trou dans la glace pour avoir accès à l’eau libre et ainsi continuer à effectuer des prélèvements. Une fois celui-ci fait, il faut l’entretenir régulièrement afin d’éviter qu’il ne regèle. On peut également continuer à pêcher depuis les « rivières » qui se forment lors de l’écartement des plaques de banquise. Il faut alors être prudent, car l’épaisseur de la banquise aux abords de l’eau est très faible.

- ICELIPIDS (pas d’acronyme juste de l’anglais). Il s’agit ici de suivre les variations de concentrations de biomarqueurs lipidiques (produits par le phytoplancton) en fonction des paramètres environnementaux : l’épaisseur de la banquise, la température de l’eau...Le phytoplancton étant la base de la chaîne alimentaire en milieu marin, l’idée est de suivre le transfert de ces biomarqueurs aux autres organismes (zooplancton, invertébrés, poissons). Sur le terrain, je réalise des carottages de glace, des prélèvements d’eau, des traits de filets à plancton. Tout ceci est ensuite analysé au laboratoire.

Pour chacun de ces deux programmes, le travail se scinde donc en deux étapes : une partie de terrain (en foncion des conditions météo) et une partie en laboratoire où l’on traite et conditionne les échantillons pour une exploitation ultérieure.

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